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Le Mythe du leadership

Le Groupe Gérard Carton vous propose tous types de lectures, longues ou brèves, souvent teintées d'humour mais toujours sérieuses...

Le nombre de publications sur le leadership interpelle. Le nombre de formations proposées sur ce thème est extravagant… 220 millions de résultats sur ce seul thème…
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Lors d’entretiens avec des dirigeants, des tops managers, des collaborateurs, ce thème est régulièrement évoqué.

Qu’est-ce alors que le leadership ? De quoi parle-t-on ?

J’ai parfois entendu des phrases telles que « Il ou elle manque de leadership » ou « c’est un ou une leader » , et lorsque l’on fait spécifier ces affirmations on obtient des indications assez intrigantes.

Les qualités attendues, les qualités démontrées, les pratiques d’interfaces avec les pairs, la hiérarchie, les collaborateurs, le type de relation établie, leur constance, le type de situations dans lesquelles s’observe le leadership sont très différents d’un interlocuteur à l’autre.

Qu’est-ce donc qui fait décerner le titre de leader ? Pourquoi n’y a-t-il pas de mot français pour dénommer le leadership ?

Lorsque l’on demande à Google de traduire « Leader », en français, on obtient « Chef » , « Patron » , « Meneur » , « Directeur » , « Commandant » et… « Leader » . En Allemand « Führer »

Lorsque l’on demande autour de soi ce qui est attendu d’un leader, les réponses sont très éloignées de ces mêmes mots, voire antinomiques de chef, patron, directeur, commandant… En fait il semble qu’il soit attendu des leaders d’influencer, rassembler, faire l’unanimité, inspirer, sans aucune forme d’autorité au premier degré, mais en obtenant l’adhésion et en générant de l’enthousiasme.

Pour autant si l’on demande de citer des exemples de leaders on entend parler de personnages comme De Gaulle, Napoléon, Mandela, Kennedy, Luther-King, Jobs, Gates…autrement dit des chefs, dirigeants, commandants…

On demande du leadership au management intermédiaire, et à des encadrants de petites équipes, et l’on en juge à leur capacité à mobiliser positivement, être suivis, assez exemplaires, positifs, et, quand il le faut, à « être des meneurs voire des décideurs » sans pour autant disposer d’une autorité statutaire, légitime ou officielle.

Beaucoup estiment qu’un leader doit être extraverti, et souvent « charismatique » , cette capacité à être estimé, apprécié, charmant, accrocheur, captivant, fascinant, intéressant, palpitant, passionnant...

En synthèse le leadership serait une forme non violente de commandement, faisant que l’on serait entendu et écouté, sans avoir d’autre autorité que celle que ceux que l’on guide nous confèrent.

Question : Lorsque l’on exige de collaborateurs, managers, qu’ils fassent preuve de leadership, n’est-on pas en pleine injonction paradoxale ?

Nous savons tous qu’il suffit de demander à quelqu’un d’être naturel ou de prendre des initiatives pour que cela soit bloquant. L’interview de collaborateurs fait ressortir qu’à chaque niveau, chacun attend de sa hiérarchie des directions claires, des décisions justes, des moyens adéquats (ce qui est du domaine du « chef » , « patron » ), accessoirement d’être entendu, reconnu, encouragé, récompensé, et d’avoir « suffisamment d’autonomie » .

En fait, il apparaît que le leadership est toujours situationnel. Ce sont les situations qui font les leaders, et non pas l’inverse. Chacun des grands leaders reconnus a émergé lors de situations exceptionnelles, et s’y est révélé exceptionnel.

Y a-t-il une forme d’hypocrisie dans l’usage du mot ?

Probablement, dans la mesure où l’on veut en fait des chefs, mais des chefs qui ne se positionnent pas en supérieur plutôt en accompagnateur, entraîneur, coach, rassembleur, développeur de talents et/ou de compétences. Le leadership serait une forme ou pratique collaborative de l’exercice du management.

Chef appartient au passé, quasiment à l’Histoire. C’est trop proche de « petit-chef », pour être acceptable par les temps qui courent.

Il semble donc in fine beaucoup plus aisé de faire le constat de l’absence de leadership que de sa présence… On sait dire ce qu’il n’est pas, bien mieux que ce qu’il est, et l’on voit mieux son absence que sa présence… D’où peut-être cet engouement pour les formations leadership, (et l’extravagance du chiffre en introduction de cet article) qui seraient alors destinées à ceux qui n’en montrent pas assez ou encore mal à propos.

Peut-être est-il temps de réviser le concept, de le clarifier, de le garder pour les grandes occasions, et de revenir aux basiques du relationnel en équipes et en management.

Que veut-on de ceux dont on attend du « leadership » ?

La capacité de réfléchir vite et bien, clairement et convenablement, d’avancer et réunir l’entourage dans l’action. Des personnes capables d’efforts constants, de détermination, de pugnacité sans agressivité, mais aussi d’écoute, de remise en cause et d’être en contrôle de leurs émotions et de leur ego. Finalement des personnes avec qui la plupart apprécient de travailler, parce qu’ils sont aussi sincères et loyaux dans leurs approches et que leur sens du devoir prime sur celui du pouvoir. Des personnes qui inspirent positivement les autres.

En anglais, l’antonyme usuel de leader est follower. En français il n’y a pas d’antonyme reconnu. Ni « suiveur » ni « mouton » ne font l’affaire, le premier étant indélicat et le second par trop péjoratif et consacré antonyme métaphorique de « loup ».

L’absence de mot et d’antonyme en français fait envisager la possibilité selon laquelle le « leadership » n’est pas culturellement français. Comme le management d’ailleurs…

Locomotive est un mot français.

Peut-être insuffisamment gracieux ou trop féminin ?


En vous souhaitant de belles inspirations,

Gérard-Dominique Carton

GDC

“Le véritable leadership dans une entreprise doit être son modèle économique et social. ”
Vincent Bolloré