Groupe Gérard Carton
La passion des solutions

Interview de Madame Myriam BARAN

Le Groupe Gérard Carton vous propose tous types de lectures, longues ou brèves, souvent teintées d'humour mais toujours sérieuses...

MB BANNER

Quelles grandes valeurs guident vos décisions et vos actions dans votre vie, professionnelle, personnelle ?

C’est très simple. Je fais en sorte d’être toujours en accord avec moi-même. La dissonance cognitive est trop coûteuse sur le long terme ! Mais ce qui guide mes pas depuis toujours, ma petite lumière intérieure, c’est le respect de la nature et des créatures, dont les humains, qui y vivent.

Plus j’apprends et plus je m’émerveille devant la perfection des mécanismes naturels. Je suis fascinée par la capacité de la nature à produire du Tout, avec très peu : 4 matériaux de base (carbone, oxygène, azote et hydrogène).

Générer une abondance de biens par le process le plus simple, sans jamais générer de déchets. Quel merveilleux modèle économique pour notre société en profonde mutation ! Je m’emploie donc, au sein de Pop’Up Mind, à partager cet émerveillement permanent avec le plus grand nombre afin d’accompagner le changement de paradigme.

Quel regard est le vôtre sur le monde de l’entreprise, les grandes, moyennes, petites ?

Je n’y vois malheureusement pas beaucoup d’épanouissement personnel. J’y vois de la maltraitance réciproque, à tous les niveaux, conséquence directe de l’hyper hiérarchisation des entreprises françaises. De la maltraitance de la part de notre système politique sur les petites et moyennes entreprises. De la maltraitance des salariés sur la direction, accusée d’être mère de tous les maux. De la maltraitance de la direction sur les salariés privés de leur parole. Et cette hyper hiérarchisation est le corollaire de notre immaturité sociétale.

C’est comme si nous n’étions jamais sortis de l’école ! On écoute la parole des enseignants sans jamais oser la remettre en question puis on passe à celle des patrons avec la même subordination à la hiérarchie. Quant aux dirigeants, ils s’auto subordonnent aux diktats de la société. Cela vient aussi du fait que nos entreprises survalorisent les ultra-diplômés et freinent l’ascension de ceux qui n’ont pas longtemps fréquenté l’école. C’est, à mon sens, une grave erreur parce que l’école ne valorise ni l’intelligence, ni la créativité, ni la prise de décision. On y apprend à apprendre et répéter ce que l’on nous a transmis.

Chaque tentative d’autonomie, chaque prise de risque est immédiatement sanctionnée. Ce ne sont jamais les plus intelligents qui réussissent le mieux, mais les plus dociles, les plus aptes à entrer dans le moule et les meilleurs apprenants. En gros, ceux qui sont les plus aptes à se laisser formater. Or notre société, en pleine mutation a besoin de souplesse cognitive…Notre salut commun viendra de ceux qui osent sortir du cadre !

Je pense par ailleurs que notre société de médias commet une erreur sémantique de base qui fausse les rapports professionnels entre salariés et dirigeants en utilisant le mot patron. Un patron de TPE PME est un individu qui jette toutes ses forces vives dans son entreprise. Qui est capable d’hypothéquer sa maison pour sauver son entreprise. Un patron du CAC40, appelé de façon abusive « grand patron », n’est rien d’autre qu’un salarié hyper favorisé qui jouit d’énormément d’avantages pour très peu de responsabilités personnelles engagées. Qualifier du même vocable ces gens qui n’ont rien de commun, entretient une confusion très préjudiciable aux créateurs d’entreprises.

Quelles sont les tracasseries, difficultés que vous rencontrez en qualité d’entrepreneur et qui vous agacent ?

Je suis sidérée par la complexité administrative totalement arbitraire. Un soupçon de bon sens et une pincée de fluidité ferait grand bien à tout le monde. Et cela devient kafkaien dès que l’on travaille avec les administrations…

Dans votre activité de conseil / formation, qu’est-ce qui vous passionne ? Vous désespère parfois ?

C’est un bonheur ineffable d’entendre les personnes que Pop’Up Mind amène dans la forêt pour s’en inspirer, nous dire qu’elles ne verront plus jamais la nature de la même façon. Que cela révolutionne leur vision du monde et donc leur comportement personnel et professionnel.

A contrario, le regard dubitatif de certains managers masculins qui ne comprennent pas le sens de nos propos et se refusent à venir apprendre de et dans la nature, me désespère. Se reconnecter avec la nature afin de retrouver et révéler sa propre nature relève pour eux du concept new-age de fumeurs de joints : C’est ridicule.

Cela étant, je pense inexorablement à la célèbre citation d’Arthur Schopenhauer : « Toute vérité franchit trois étapes. D’abord elle est ridiculisée. Ensuite elle subit une forte opposition. Puis elle est considérée comme ayant été une évidence » alors je me dis que nous sommes dans le juste. Je constate quand même que les femmes ont globalement plus évolué que les hommes sur ces questions. Elles sont déjà au stade de l’évidence quand la plupart des hommes oscille entre ridicule et opposition…

Quelles qualités / compétences sont selon vous essentielles pour Enseigner, Manager, Inspirer ?

Je n’ai pas d’expertise en management. Je ne connais que le leadership que l’on rencontre dans toutes les sociétés animales et qui est très différent de la notion de dominance telle qu’on la pense souvent. Si l’on prend l’exemple des chevaux, l’étalon dominant a pour seul métier (autre que la reproduction), de protéger la harde.

Mais le leadership revient toujours à une jument expérimentée (donc âgée) qui sait où mener le troupeau pour trouver les bon pâturages ou les bons abris. Chez les animaux c’est le savoir, l’expérience et l’intelligence qui déterminent les leaders.

Quant à l’enseignement, la seule chose que je sache c’est que la nature a sélectionné le jeu comme seule et unique méthode d’apprentissage. C’est en jouant que l’on apprend et plus on joue mieux on apprend. Par ailleurs, la facilitation sociale, sorte d’apprentissage par imitation, très étudiée chez les primates, ne peut se mettre en place que lorsqu’il existe une forte relation de respect voire d’admiration de l’apprenant pour le « professeur » .

Deux notions dont l’éducation nationale devrait me semble-t-il tenir compte. Enfin et juste pour l’anecdote, chez les populations de primates chez qui le jeu est très développé et la facilitation sociale un fort moteur d’évolution comportementale, il existe une seule catégorie d’individus incapables d’apprendre : ce sont les mâles dominants. Ils n’ont jamais besoin d’apprendre car ils spolient leurs sujets en s’accaparant leurs biens acquis par apprentissage. Une jolie leçon à méditer…

Quelles sont vos priorités en tant qu’entrepreneur ?

Ne jamais entrer dans le moule dans lequel la société essaie de nous faire tenir. Refuser le dogme partout et toujours. M’inspirer de la nature en toutes circonstances.

Quelles qualités attendez-vous de vos interfaces directes ?

La franchise, l’honnêteté, l’authenticité. La base ! mais une base qui fait parfois cruellement défaut dans le monde entrepreneurial.

Quels défauts vous inquiètent / interpellent, chez vos interlocuteurs ?

Le manque de franchise, le manque d’honnêteté, le manque d’authenticité. On irait tellement plus vite et plus loin, tous ensemble si nous partagions ces valeurs communes !

Comment établissez-vous vos priorités ?

Ma seule priorité est que tous, urgemment, nous prenions conscience que la protection de la nature n’est pas une lubie de bobos mais un impératif pour continuer à vivre, et non pas survivre, sur notre jolie planète. Et si nous avons créé Pop’Up Mind avec ma soeur Claudie, c’est pour porter cette voix.

Apprendre, Comprendre de la Nature et cesser de Prendre.

Contrairement à ce que l’on entend partout, l’écologie ne s’oppose pas à l’économie. Elle en est la mère ! Sans défense de notre environnement naturel il est tout à fait illusoire d’imaginer défendre l’environnement humain et sociétal. Je suis sidérée d’entendre tous nos décideurs parler de croissance ce qui implicitement signifie croissance quantitative. Alors qu’un vrai changement de nos pratiques nous amènerait vers une croissance qualitative tellement plus profitable à tous !

Quels stéréotypes sur la vie professionnelle vous agacent ?

J’ai horreur des conventions. Le dress code et la novlangue me révulsent. Tous deux sont l’allégorie parfaite de la robotisation à l’œuvre partout dans la société. Nous ne serions donc que ce que l’on affiche ?

Il suffirait donc de porter le costume ad’hoc et de jargonner trois mauvais mots de globish totalement dépourvus de sens pour passer pour, au choix : vertueux, intelligent, performant, professionnel ? Quelle imposture !

Qu’est-ce qui a le plus évolué, selon vous, dans le management ces dix dernières années, et qu’est-ce qui n’a pas suffisamment évolué ?

Je n’ai pas 10 ans d’expertise dans ce domaine ! Mais il y a un point qui est depuis longtemps une grande source d'agacement : Je ne comprends pas le besoin d'utiliser un vocabulaire abscons pour développer des notions faciles à comprendre. Comme s'il fallait se parer d'un manteau pseudo-intellectuel afin de passer pour intelligent aux yeux de ses confrères.

Cet entre-soi qui exclut tous ceux qui ne possèdent pas le bagage sémantique que se réserve "l'élite intellectuelle" est à mon avis, un des moteurs de la fracture sociale. Au moyen âge on distinguait le médecin du boulanger à sa tenue vestimentaire.

Aujourd'hui on se complait à utiliser un vocabulaire excluant et cela est tellement développé dans le milieu de l'entreprise que ça frôle le ridicule... Plus le propos est vide de sens, plus on s'applique à utiliser le vocabulaire obscur de la novlangue. Pourtant « ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément » ainsi que l’a si joliment dit Nicolas Boileau. Retrouvons les joies de la simplicité !

Qu’est-ce qui pour vous caractérise une situation « difficile », « pénible » « passionnante » ?

Les situations passionnantes sont toujours dans le partage des émotions et l’éveil aux enseignements de la nature, au cœur de la forêt. Là il n’y a plus de faux semblants possibles. Tout est juste. Les situations pénibles sont malheureusement liées aux schémas archaïques de notre vieille société patriarcale dont les médias commencent aujourd’hui à s’emparer.

Quels mots / pensées associez-vous aux mots suivants :

C’est drôle de voir à quel point chaque ligne de votre tableau porte en soi les réponses à votre question !

TABLEAU MB

La nature de la réussite dépend de l’expérience d’avoir eu le courage de ses ambitions !

La stratégie des femmes est de développer leur créativité afin d’atteindre leurs objectifs pour préparer l’avenir !

Il est impératif d’opérer une formation sur la libération de la parole au travail en concertation mais avec détermination .

La valeur que l’ego des hommes développe avec plaisir serait-elle la compétition ?

En vérité , la coopération devrait guider l’esprit de management afin d’éviter les problèmes .

Auriez-vous quelques anecdotes à partager qui illustrent votre philosophie de vie ?

Un adage mexicain : ils ont voulu nous enterrer. Ils ignoraient que nous étions des graines !

Si je ne suis la graine, je voudrais au moins être la semeuse à tous vents du Larousse. Porter la voix de la nature afin que nous soyons nombreux à nous en inspirer. Cela fait des millions d’années qu’elle peaufine le fonctionnement de ses écosystèmes. C’est le meilleur modèle de société vertueuse et performante.

Imiter la nature dans nos pratiques managériales (ce que Pop’Up Mind appelle du bio mimétisme sociétal) nous permettra de créer une croissance qualitative profitable à tous pour vivre longtemps en harmonie sur notre jolie petite planète !

Et léguer à nos enfants, non plus un futur enviable, mais juste un futur viable.

Voire juste un futur.

Propos recueillis par GDC

Decembre 2019