Publié dans La Lettre du GCCG - Stratégies managériales
Quels grands principes guident vos décisions dans votre vie professionnelle ?
Je suis attaché à la notion de justice, d’équité ; qu’il s’agisse de prendre une décision pour moi-même ou de trancher pour autrui, je tiens à respecter cette valeur.
Je m’efforce également d’avoir une analyse arborescente, non linéaire, avant de prendre une décision.
Enfin, et c’est souvent le plus difficile, je m’attache à prendre des décisions en accord avec mes convictions, avec ce en quoi je crois.
Quelles qualités/compétences sont selon vous essentielles pour un dirigeant ?
La capacité à se projeter, à anticiper.
Savoir s’élever au-dessus de la mêlée, dépasser les contingences quotidiennes. Utiliser son intuition, son savoir-faire et surtout démontrer son savoir-être. Être en capacité d’emmener ses équipes et de les soutenir, en particulier dans les moments difficiles.
S’attacher à la notion de devoir, plus qu’à l’exercice du pouvoir.
Quelles sont vos priorités en tant que dirigeant ?
Concilier la mission qui m’est confiée avec mes valeurs et l’humain. Je crois dans l’écoute, l’entente, et pense que la plupart des gens aiment bien faire, sont plutôt consciencieux. J’aime construire, créer de la valeur, produire des résultats, avancer dans le bon sens, avec bon sens.
Quelles qualités attendez-vous de vos collaborateurs directs ?
La motivation, aimer faire, avancer, obtenir des résultats. Avoir le sens des responsabilités et la capacité à communiquer de manière constructive ; j’attends aussi qu’ils soient autonomes, et enfin qu’ils aient de l’humour… Je pense que le sourire et le rire sont d’excellents moyens d’entretenir des relations plaisantes et pour autant productives.
Quels défauts vous inquiètent/interpellent ?
La déresponsabilisation, la victimisation, la résistance « systématique » au changement, le passéisme avec son cortège de nostalgie et de regrets infondés, la morosité.
Je crois que ce qui précède est un indicateur fort de défaitisme, et le défaitisme conduit à la défaite, et favorise une tendance à la complaisance.
Comment gérez-vous votre stress de dirigeant ?
Comme tout le monde, de manière empirique et variable selon les moments. Je marche beaucoup dans les couloirs, les étages, car l’exercice physique est un bon moyen d’évacuer la pression. J’ai aussi une formation de praticien en cohérence cardiaque, donc la respiration consciente vient souvent à mon secours !
Quelles satisfactions vous donne votre rôle de dirigeant ?
Ce rôle est nouveau pour moi, c’est donc avant tout une occasion quotidienne d’apprendre et l’apprentissage tous azimuts est un carburant essentiel pour moi.
J’ai aussi découvert, après un quart de siècle d’activité en solo, le plaisir et l’enrichissement du travail en équipe.
Le juridique et les RH sont par ailleurs aux confins de multiples problématiques croisées et cela convient bien à mon goût pour la cogitation foisonnante !
Quelles habitudes de travail font votre réussite ?
Du fait de mon parcours atypique, je pense faire les choses différemment, ce qui parfois, souvent, surprend, mais aussi séduit. Je tranche rapidement en m’efforçant d’éviter la précipitation.
J’utilise beaucoup l‘humour, l’autodérision et je pratique un management de proximité que j’espère aussi bienveillant que rigoureux.
Quels sont selon vous les critères révélant une bonne équipe de Direction ?
Vaste question ! Il faut bien sûr, au-delà des personnalités et des pratiques propres à chacun, qu’il y ait une bonne entente, des relations fluides, de confiance. Il faut partager des valeurs, une vision. Les différences sont, comme dans tous les groupes, une source d’enrichissement comme elles peuvent être source de frictions et d’incompréhensions. Le rôle de rassembleur du PDG/DG est à mon sens essentiel. C’est lui ou elle qui créé le lien, c’est l’alchimiste.
Quels stéréotypes sur le management combattez-vous et comment ?
Je ne combats rien parce que selon moi cela ne sert à rien. Je crois davantage au fait de montrer une autre voie, d’autres pratiques, sans se « gouroutiser » pour autant. Mais l’autoritarisme à tout crin, la non communication, la manipulation, la rigidité intellectuelle et managériale, la résignation sont à mes yeux les comportements les plus toxiques.
Si vous aviez des conseils à donner à un jeune dirigeant, lesquels lui prodigueriez-vous ?
Mais je suis ce jeune dirigeant !
Sérieusement, c’est très difficile de donner des conseils ; je dirais simplement : « ne vous trahissez pas », « ne trahissez pas vos valeurs, vos principes » et donc « soyez vous-même et ne ratez jamais une occasion d’apprendre ».
Qu’est-ce qui pour vous caractérise une situation « difficile » ?
Ce n’est pas la complexité du problème ou les aléas qu’il comporte qui sont les plus difficiles à surmonter, ce sont les résistances, les hésitations, les forces d’inertie contre lesquelles il est souvent épuisant d’agir.
On ne résout aucun problème seul dans l’entreprise. C’est toujours une œuvre collective. S’entendre sur la vision (où l’on va et comment) est essentiel.
Qu’avez-vous appris au cours de votre carrière qui vous sert quotidiennement ?
Mes 25 ans de barreau m’ont donné la capacité à m’adapter, la réactivité, un certain sang-froid, une bonne capacité d’analyse des situations et des personnes, et aussi une aptitude à la médiation. En outre, j’ai appris à « monter sur le ring » quand c’est nécessaire …
Quels grands challenges s’annoncent pour le management dans le futur à moyen terme ?
A mes yeux, ils sont essentiellement humains. Dans ce monde extrêmement rapide, changeant, hyperconnecté, où les nouveaux dieux s’appellent intelligence artificielle, transhumanisme, mondialisation, c’est notre identité et notre dignité humaine qui sont les plus en danger.
Le management, c’est gérer l’humain, et déjà le mot gérer associé à humain est un oxymore. Il faudra donc des hommes et des femmes aux convictions et valeurs fortes, capables de résister au chant des sirènes des sociétés aseptisées et déshumanisées qui se dessinent, pour ne pas se perdre totalement.
Quels mots/pensées associez-vous aux mots suivants :
Avez-vous une ou deux anecdotes à partager ?
Pas de façon spécifique. Je suis peu tourné vers le passé… J’adorerais pouvoir vous raconter une anecdote du « futur »… En revanche, dans mon précédent métier d’avocat autant que dans mes fonctions actuelles, les rencontres que j’ai faites, tant de personnes que de situations, sont toutes mémorisées, intégrées… j’ai beaucoup appris et espère encore beaucoup apprendre. Le sentiment d’être « réellement » utile et le sens sont le fil conducteur pour moi.
Propos recueillis par Gérard-Dominique Carton- Président GCCG
Janvier 2019