Groupe Gérard Carton
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Le management mystificateur pour les nuls

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Mystificateur : Qui tend à tromper par une apparence de vérité en déformant la réalité afin de la rendre plus attrayante.

Le savoir-être, synthèse de softs-skills (plus softs que skills), dont tant d’articles et gourous se font l’écho, que tant de formations accélérées se réclament d’inspirer, se traduit et se résume souvent à du savoir-paraître.
De fait, le management « moderne » a son lot d’hypocrisie et de ruses et sa pléthore de mystificateurs.
Toutefois, certains ne maîtrisent pas quelques concepts, comportements et outils de nature à leur permettre de traverser avec succès la mer démontée de la compétition interne et de gagner la course des rats en se faisant passer pour des colombes...Alors, pour ceux qui souhaitent se donner la peine (ou le plaisir) d’être un manager mystificateur, sans en avoir l’air, ce qui est un « must » voici quelques conseils utiles :

1- Vous êtes ce que vous paraissez. Ce que vous êtes vraiment ne regarde que vous et ne doit être connu que de vous. C’est l’impressionnant exemple que donnent les psychopathes en liberté. Ils sont incontestablement experts en mystification, inspirez-vous de leurs stratégies dont la première est d’être au moins deux personnes différentes selon l’entourage et les situations. Le voisin charmant et attentionné qui est un prédateur hors son cercle…

2- La sincérité est juste un concept ; il convient d’adopter la sincérité situationnelle, qui a pour base « la vérité du moment » . Ce qui est vrai aujourd’hui peut ne plus l’être demain, et inversement. Souvenez-vous, ce n’est pas la girouette qui change, c’est le sens du vent. Le vent c’est le pouvoir et l’énergie, toujours naviguer sous le vent, jamais contre. Alors il vous mène à destination, sa destination, et donc la vôtre. Réussir, gagner, dominer.

3- On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre. Soyez séducteur. Il est plus facile de dominer les gens qui vous aiment que ceux qui vous détestent, et c’est moins fatigant. Ils veulent entendre des compliments ? Donnez-en à foison. Ils se croient intelligents ? Renforcez-les dans leur croyance, au demeurant, plus ils sont bêtes, plus ils vous croiront. Ils veulent des sourires et des câlins ? Allez-y, soyez chaleureux, compatissant ; avec un peu d’entraînement, on peut paraître ému pour les choses les plus insignifiantes… C’est dans le regard aisément embué que votre réputation de personne empathique fera le tour de votre sphère. (Pour cela, passez un peu de gel anti bactériologique sur vos doigts, passez-les discrètement près de vos yeux, et le tour est joué.). Comme par ailleurs vous pourrez tenir un langage guerrier avec les chefs, vous pourrez aussi expliquer à vos collaborateurs que c’est de là-haut que viennent les ordres, que vous avez tout essayé, mais que… Souvenez-vous aussi et toujours que plus un mensonge est gros, plus il passe.

4- La loyauté est unique. Ne soyez loyal qu’à vous-même et vos intérêts, accessoirement et selon les circonstances aux plus forts, jamais aux plus faibles, ils sont source de problèmes et retardent les ascensions. Alors, écrivez peu, signez peu. Sur ce point, pour tout ce qui pourrait se retourner un jour contre vous, utilisez l’outil le plus sûr, d’ailleurs largement recommandé par les champions du management : la délégation. Déléguez, Déléguez ! Que des avantages… Si ça tourne bien comme vous êtes le chef, cela vous sera attribué. Si ça tourne mal, le pire que vous risquez est de vous entendre dire que vous avez mal choisi votre collaborateur. C’est pourquoi vous n’embaucherez personne sur votre seul avis. L’idéal est que vous ne choisissiez pas vos collaborateurs, car en cas de difficulté vous pourrez clamer qu’ils n’étaient pas votre choix et en cas de succès de leur part vous l’attribuer, car cela rend évident que vous les avez bien managés.

5- N’ayez aucune exigence. Moins vous serez exigeant, plus vos collaborateurs seront heureux et s’ils ne le sont pas on pourra en chercher la cause ailleurs. Adoptez le discours ambiant consistant à trouver toutes les excuses et circonstances atténuantes aux faibles, lorsque vous êtes avec eux, et le discours teinté d’ambitions avec les forts.

6- Apprenez par cœur les mots « sésames » du management mystificateur.
a. Bienveillance : Elle n’exclut pas de se montrer autoritaire ou directif. En outre, au besoin, surfez sur le « qui aime bien châtie bien » , toujours pris à contresens, et justifiant d’être sur le dos de certains.
b. Écoute : Quoi que l’on vous dise, prenez un air pénétré, hochez la tête de haut en bas, regardez les interlocuteurs dans les yeux, ne dites rien d’autre que des « humm » ; pendant ce temps, pensez à vos succès, cela allumera la petite lumière dans vos yeux et chassera le reflet de l’ennui profond qui est le vôtre d’avoir à « écouter » des sornettes. En fin d’écoute, n’hésitez aucunement à paraphraser le général de Gaulle, avec un « je vous ai compris » , bien senti. Il suffit de donner du temps d’écoute pour véhiculer l’impression que vous écoutez, mais surtout n’écoutez rien, sauf ce qui vient des gens du haut.
c. Empathie : Prendre l’air des circonstances de ce qui est dit. C’est triste ? Ayez l’air contrit. C’est gai ? Souriez. Le reste du temps, prenez un air « attentif » , penchez-vous légèrement en avant, lorsqu’on vous parle, ne croisez jamais les bras. Vous n’avez aucunement besoin de ressentir quoi que cela soit des ressentis des autres, il suffit de faire croire que cela vous touche. En fin de journée, vous pourrez en rire en bonne compagnie.
d. Compréhension : Montrez-vous concerné par les futilités dont on vous inonde, dites très souvent « je vous comprends » , « merci de ce point de vue » , « je le note » … Les gens vont vous adorer.
e. Intérêt supérieur : À sortir pour faire avaler la pilule ou les potions amères lorsque les circonstances l’exigent.

7- Le cynisme est une qualité, mais elle doit être cachée. En fait ce que beaucoup appellent du cynisme est en réalité de la lucidité, on ne doit donc pas se sentir mal d’être profondément cynique. D’ailleurs, regardez autour de vous, les cyniques tiennent souvent le haut de l’affiche. Ils savent avec qui on peut le partager, ne font jamais l’erreur de le laisser apparaître en public large. On peut parler des « bouzeux » pour qualifier les agriculteurs, mais pas au salon de l’agriculture.

8- Les valeurs que vous défendez et portez sont positives, elles n’ont rien à voir avec vos valeurs et principes de fond. On dit ce que les gens veulent entendre, pas ce que l’on pense vraiment et qui porte sur les moyens de réussir. Les valeurs mises en avant avec succès par les bons mystificateurs sont lumineuses :
a. Solidarité en réalité « moi pour moi, tous pour moi »
b. Entraide en réalité « Aidez-moi et le ciel vous aidera »
c. Humanité : « Aimez-moi, et je m’aimerai encore plus »

9- Portez haut les grandes causes du moment. C’est très efficace pour votre image de « personne bien ». La beauté de ce principe tient au formidable nombre de grandes causes trimballées sur les réseaux sociaux. (Voir aussi point 10 ci-après). Cela va du climat en passant par la cause des animaux, la diversité, et surtout l’égalité hommes-Femmes (bien choisir le placement de la majuscule). Dans le même temps, émettez des réserves sur les élites, le gouvernement, (pas trop tout de même, restez « bienveillant »).

10- Comptes Instagram, Facebook et LinkedIn impeccables. Relayez les posts, articles et photos qui ont du succès, ne faites aucune autopromotion, soyez toujours positif, et de temps en temps, marquez une réserve (sans aller jusqu’au désaccord) sur des sujets qui ne font pas l’unanimité, ou qui laissent transparaître une sorte d’exigence de performance ou de responsabilité.

Voilà comment se mettre sur la voie du management mystificateur. Se faire un plan d’action pour parvenir à tout intégrer de façon progressive. Avec un peu d’entraînement chaque jour, en profitant sans vergogne des circonstances offertes par l’actualité, on y parvient sans trop d’effort, ce qui est important. Souvenez-vous qu’un bon mystificateur est celui qui apparaît comme un extraordinaire contributeur / bosseur, alors qu’en réalité il ne fiche pas grand-chose et en fait le moins possible. Il ne travaille que pour son ascension et ses avantages et le fait en dosant scrupuleusement ses efforts.

Paraître est le but ultime.

Enfin connaître ses statistiques. Lorsque 35% des personnes autour de vous, vous trouvent formidable, votre popularité croît de façon exponentielle.

Un dernier conseil. La sagesse populaire dit que l’on ne peut se mentir à soi-même. C’est faux. N’en croyez rien. On peut se mentir, il suffit pour cela de se répéter inlassablement les contre-vérités qui aident à devenir un parfait mystificateur. On vous critique ? c’est du bashing. On doute de votre sincérité ? c’est de la paranoïa. Votre conscience vous envoie des signaux ? Faites-la taire, et elle se fera une raison au bout d’un certain temps ; sachez qu’elle ne gagne jamais contre le plaisir d’être estimé et d’en tirer des avantages matériels substantiels. Les grands mystificateurs savent tous que tout s’achète, en premier lieu les consciences, dont la leur.

Voilà. Il me semblait important de modestement contribuer à la professionnalisation de la mystification. Si l’on doit mal faire autant le faire bien.

Ceux qui sincèrement s’efforcent de respecter des valeurs saines, respectueuses d’autrui, et d’avoir des comportements constructifs, pourront, en ayant lu ce qui précède, vouloir identifier les tartuffes et autres mystificateurs … L’approche la plus simple, pour les révéler, est de parler avec eux, en one to one, et de créer une relation de confiance dans laquelle, il se laisseront aller à dire le fond de leur pensée…Ils le feront s’ils n’ont pas lu ce qui précède.

Gerard-Dominique Carton


GDC

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