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Le prix du temps

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Publié dans La Lettre du GCCG - Divers

Il existe une masse considérable de travaux scientifiques sur le sujet. La compréhension du concept de valeur psychologique du temps et de ses effets, ouvre la voie à la compréhension de l’irrationalité de certaines décisions, et au-delà à la prise de décisions rationnelles.

« Le temps est l’ultime ressource finie de la vie, trouver comment l’utiliser au mieux est un vrai objectif à la fois au niveau individuel et au niveau des choix publics qui sont concernés par le bien-être humain 1 » (Kahneman et Riis)

Ce n’est pas qu’une question de bien-être, et cela concerne le sujet intemporel du changement.

Quelques notions à assimiler / raviver :

  • 1 - La préférence temporelle : c’est la notion de préférence pour l'utilité immédiate par rapport à une utilité future. Elle est illustrée par le dicton « un tien vaut mieux que deux tu l’auras ». Lorsque l’on a le choix entre 100 tout de suite et 110 dans un mois, on a tendance à préférer 100 tout de suite. L’individu pèse et compare l’utilité des instants futurs, c’est la notion de pesée des plaisirs et des peines. Il existe une asymétrie entre la représentation des plaisirs et celle des peines. Elles n’ont pas le même poids. Les plaisirs sont souvent sous-évalués et les peines souvent exagérées. Dans ce cas l’arbitrage se fait en faveur de l’évitement. (Avoir plus à perdre qu’à gagner).

  • 2 - Le taux d’impatience par lequel les conséquences futures sont moins importantes que les conséquences immédiates, et cela inclut les facteurs qui diminuent l'utilité anticipée d'une future conséquence comme l'incertitude ou le changement des préférences.

  • 3 - La valeur du temps est subjective et découle directement d’une perception individuelle des choix entre le « moi » présent et les « mois » futurs. La plupart des gens ne prend pas en compte que le « moi » actuel est différent du « moi » futur. Notre représentation de la réalité évolue avec le temps. Imaginer celle que l’on se fera dans le futur est difficile et, pour certains, impossible.

  • 4 - Le prix psychologique du temps est variable dans le temps pour un même individu. La patience augmente avec l’âge, les jeunes accordant un prix psychologique du temps très faible en comparaison avec une population plus âgée. Toutefois, Read et Read mettent en évidence que si les adultes les plus âgés (en moyenne 75 ans) représentent le groupe de population le plus patient lorsque les délais de temps sont inférieurs à 1 an, ils sont le moins patient lorsqu’il s’agit de délais de 3 à 10 ans. En clair, les jeunes ont le sentiment d’avoir beaucoup de temps devant eux, ce sentiment diminue avec le temps et le prix psychologique du temps augmente avec l’âge.

  • 5 - Les aptitudes cognitives ont une influence certaine sur la préférence temporelle et l’attitude envers le risque, et sont liées à la patience. Plus les individus sont réfléchis et ont une capacité d’analyse plus ils sont patients. Les enfants sont impatients non pas par nature mais par manque de connaissances. Il existe un CRT, (indice de réflexion cognitive), calculable facilement, opposant les individus qui formulent des réponses intuitives à ceux qui prennent des décisions réfléchies. Il ressort que les personnes ayant un CRT important sont plus tolérantes au risque.

Alors, me direz-vous, que faire de tout çà ?

  • 1 - Comprendre que face au changement, face aux décisions, face au choix, les individus prennent position à partir de la valeur psychologique du temps qui est la leur.

  • 2 - La capacité que l’on a à aider les individus à faire des choix et des arbitrages rationnels dépend directement de notre compréhension de la valeur psychologique du temps qui est la leur.

  • 3 - Admettre que la valeur du temps est subjective, individuelle et donc échappe à la pression normative dans la plupart des cas. C’est pourquoi dans une équipe ou un corps social, tout le monde ne va pas à la même vitesse vers les objectifs collectifs.

  • 4 - Accepter que la plupart des individus accorde plus de poids aux inconvénients qu’aux avantages dans leur estimation des gains et des pertes. C’est ce qui rend les résistances plus fortes dans les processus de changement, car elles naissent de l’aversion pour le risque elle même prenant sa source dans la surestimation des peines futures.

  • 5 - Enregistrer l’importance des aptitudes cognitives. Cela signifie qu’au delà de l’information, la formation et le développement des connaissances sont les clés de :

    • a. La diminution de l’aversion pour les risques
    • b. L’amélioration de la patience
    • c. La conception de décisions et de choix rationnels
    • d. L’harmonisation du vécu des « deadlines » et de la gestion en mode projet
    • e. La représentation du changement comme un allié et non plus une menace.

Quelques pistes d’action ?

  • 1 - Sensibiliser les collaborateurs au concept de « Valeur Psychologique du Temps », l’appeler « prix du temps ».

  • 2 - Permettre aux managers / collaborateurs de mesurer leur CRT, et par là de le faire évoluer.

  • 3 - Prendre en compte ce concept dans la communication interne et faire évoluer les représentations du prix du temps

Pour ceux qui voudraient en savoir plus, voici le lien vers le meilleur article sur le sujet, écrit par Hubert De La Bruslerie, Florent Pratlong : https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-00636357/document

Très cordialement,