Publié dans La Lettre du GCCG - Stratégies managériales - Réflexions et humanisme - Leadership
Il ne se passe pas une journée sans que soient rapportés des faits divers et publiés des articles concernant le rejet des formes les plus courantes, sinon banales de l’autorité, par toutes sortes de populations.
Jeunes, vieux, citadins, ruraux, aficionados ou non des réseaux sociaux, il y a toujours quelqu’un ou quelques-uns quelque part prêt à en découdre avec un ou des porteurs d’une autorité.
La culture Woke est au top de la contestation de l’autorité, quand bien même elle fonctionne sur un mode autoritaire, péremptoire voire dogmatique.
*Croyez-vous que la culture Woke soit un épiphénomène? *.
• « Être woke » englobe tout ce qui est relatif aux injustices et oppressions. Les « dominés » doivent « s’éveiller », se libérer et combattre activement les « dominants » qui usent de leurs privilèges sur eux.
• Cette approche au départ centrée sur le sujet du racisme, puis du rapport hommes-femmes, se déploie en particulier chez les jeunes, plus grands utilisateurs des réseaux sociaux, et englobe tous les sujets de société, y compris le travail, la relation hiérarchique, et sur le fond l’autorité.
La Boétie a sagement démontré que l’autorité est un concept, et que sa réalité repose sur la soumission. Sans soumission d’autrui, pas d’autorité de qui que cela soit. L’autorité est fondée sur une variété de facteurs, notamment :
• Connaissances
• Expérience
• Compétences
• Qualification
• Statut
• Délégation
• …/…
Accepter l’autorité de quelqu’un est se « soumettre ».. Depuis plusieurs années, la « soumission » est de moins en moins « naturelle » et « normale », et de fait, ce mot n’est pas en odeur de sainteté… Il est connoté très négativement, comme si toute soumission était une négation totale de soi, une faiblesse, un asservissement …
Ainsi l’autorité des enseignants, des agents de la loi, et des parents et bien sûr des gouvernements est-elle à rude épreuve, comme en attestent les informations circulant sur le sujet.
On botte en touche concernant l’autorité des dirigeants et managers, et la grande trouvaille est celle du leadership. Avec le leadership, plus besoin de recours à l’autorité, car il est ultimement défini comme la capacité à faire vouloir et aimer ce que l’on demande / veut, par ceux à qui on le demande.
Le leadership est l’art d’obtenir de quelqu’un d’autre qu’il fasse ce que vous souhaitez voir accompli parce qu’il veut le faire..
General Dwight Eisenhower
Les managers qui persistent sur le chemin de l’autorité sont rapidement considérés comme des petits chefs, ou des survivants « anachroniques » et « moyenâgeux », tant la littérature managériale incite à l’écoute, l’empathie, et recommande d’abandonner le « commandement ».
Or, Aristote, qui n’a pas dit que des sottises, fait ce constat : celui qui n’a jamais appris à obéir ne peut être un bon commandant..
Moins dans sa jeunesse on a appris à obéir, moins on aura de compétence pour exercer la fonction de « chef ».
En niant la légitimité du recours à l’autorité, on fabrique des collaborateurs qui seront bien en peine de manager efficacement.
• La clé d’un leadership réussi aujourd’hui c’est l’influence, pas l’autorité..
Kenneth Blanchard
En substituant « l’influence » à l’autorité, on a reculé pour mieux sauter, car est apparue rapidement la notion « d’influence malhonnête », la fameuse « manipulation ».
Il faut « vivre avec son temps », dit le sage….
La question stratégique pour l’exercice du management est simple : comment remettre en bonne place l’autorité dans l’entreprise lorsqu’elle est rejetée sinon proscrite dans la société civile ?
L’absence d’autorité est créatrice d’indiscipline, tant collective qu’individuelle. La discipline a été ringardisée, et l’indiscipline est souvent louée.
Il reste à démontrer que sans discipline. on puisse atteindre un haut niveau de performance. Je ne connais pas un seul « top performer » dans les arts, le sport, la science, la chirurgie, et tant d’autres métiers qui ne soit, à la base, totalement discipliné..
À la fin d’un de ses concerts, Rubinstein est approché par une dame émerveillée qui lui dit « Ah… Maître, je donnerais ma vie pour pouvoir jouer comme vous le faites ». , ce à quoi il répondit « Madame, j’ai donné la mienne … ». (au moins 5 heures de pratique quotidienne du piano.)
L’autodiscipline est un talent. La discipline collective une force. L’autorité légitime, fondée notamment sur la compétence et la recherche de progrès est la meilleure façon de mettre en œuvre une vision cohérente et d’assurer la performance individuelle et collective.
L’humilité, instituée universellement comme preuve d’intelligence, consiste aussi à accepter l’autorité de ceux qui nous protègent, nous enseignent, nous guident, et parfois, nous contrarient.
L’exigence, reconnue comme levier de progrès, est fondamentalement indissociable de l’autorité, n’en déplaise aux « modernistes », qui veulent réécrire l’Histoire, changer le monde et remplacer certaines élites par d’autres…
Accepter l’autorité légitime n’est pas se soumettre aveuglément ; nous avons tous un arbitre majeur appelé conscience, éthique, et parfois, « bon sens » … Ainsi les expériences de Stanley Milgram reprises dans le film « I comme Icare » montrent aussi que tout le monde n’accepte pas de se soumettre à une autorité attentatoire, arbitraire et immorale..
En vous souhaitant une belle semaine,
Bien cordialement vôtre,
Gérard-D Carton
07 60 07 31 67
001@gcarton.com